Mise en demeure des entreprises Auchan, Carrefour, E. Leclerc et Picard Surgelés

Mise en demeure des entreprises Auchan, Carrefour, E. Leclerc et Picard Surgelés, de se conformer à leur obligation d’accessibilité numérique pour leurs services de courses en ligne.

Communiqué de presse
Paris, le 8 juillet 2025

Depuis le 28 juin 2025, le code de la consommation oblige les petites, moyennes et grandes entreprises à commercialiser des produits et services accessibles à toutes et à tous, afin de lever les obstacles constitutifs d’une situation de handicap. A l’heure de la dématérialisation et de la digitalisation de notre économie, cette obligation est décisive pour garantir l’accessibilité numérique des services en ligne.

Début juillet les associations de mal-voyants et aveugles, ApiDV et Droit Pluriel, accompagnées par le collectif de juristes Intérêt à Agir, mettent en demeure plusieurs entreprises de la grande distribution pour inaccessibilité numérique de leurs services.

Au terme d’un appel à témoignage, 4 entreprises, parmi les principaux acteurs de la grande distribution française, sont apparues comme particulièrement défaillantes en matière d’accessibilité:

·       Auchan pour son site internet (www.auchan.fr) et son application mobile

·       Carrefour pour son site internet (www.carrefour.fr)

·       E. Leclerc pour son site internet (www.e.leclerc)

·       Picard Surgelés pour son site internet (www.picard.fr) et son application mobile.

Si au 1er septembre, les services de course en ligne proposés par ces acteurs ne sont pas rendues complètement accessibles, les associations se tourneront vers la justice pour faire cesser cette violation de la loi qui est à l’origine d’une sérieuse discrimination pour les personnes en situation de handicap visuel.

L’accessibilité dans la vie quotidienne des personnes en situation de handicap visuel est un droit et une nécessité pour leur permettre de vivre de façon indépendante et de participer pleinement à tous les aspects de la vie.

Violer la loi, c’est illicite et discriminatoire… Or, en France, 12 millions de personnes sont concernés par l’accessibilité numérique.

Ce que que prévoit le code de la consommation à compter du 28 juin 2025  

Depuis 2023, le législateur a inscrit dans ledit code l’obligation pour les grandes entreprises de mettre sur le marché des produits et de fournir des services conformes aux exigences d’accessibilité.

Cette mesure, initiée à l’échelle européenne, par la directive 2019/882 dite « Acte européen sur l’accessibilité », vient compléter les obligations figurant déjà depuis plusieurs années dans la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes en situation de handicap.

Tout service numérique, qu’il s’agisse d’un service de communication (site internet, intranet, extranet, applications mobiles…) ou d’un service économique (commandes de course en ligne, livraison à domicile, gestion d’un espace client…) doit être accessible aux personnes handicapées.

Un environnement dans lequel les produits et les services sont plus accessibles permet de construire une société plus inclusive et facilite l’autonomie des personnes en situation de handicap.

Les acteurs concernés par la mise en demeure avaient 2 ans pour se conformer à cette obligation.

C’est quoi l’inaccessibilité numérique des personnes aveugles et mal-voyantes ?

Face à une inaccessibilité numérique, une personne en situation de handicap visuel est exactement dans l’état de la personne handicapée moteur confrontée à un escalier : il ne peut franchir seul l’obstacle et doit toujours recourir, malgré l’équipement informatique sophistiqué dont il dispose, à l’aide d’un tiers.

L’Observatoire du respect des obligations d’accessibilité numérique, mis en place par la Fédération des aveugles et amblyopes révélait, en juin 2025, que seulement 3,4 % des sites internet des grandes entreprise sont accessibles.

Pourtant, les mesures à prendre sont connues et possibles à mettre en œuvre : tous les éléments doivent être activables par clavier et la commande vocale doit pouvoir naviguer facilement dans la structure du site ou de l’application.

Pour une personne en situation de handicap visuel, faire ses courses en ligne est le seul moyen pour pouvoir accomplir cet acte de la vie quotidienne en toute autonomie.

En ne se conformant pas à la loi, les acteurs aggravent d’autant plus la situation de handicap de ces personnes et leur refuse l’autonomie et l’égalité auxquelles elles ont droit.

Ils témoignent :

Céline, utilisatrice aveugle du site picard.fr explique qu’elle ne peut pas choisir le mode de livraison click and collect (gratuit) et qu’elle est obligée d’utiliser la livraison (payante) en raison de l’inaccessibilité du site internet.

Sur l’application, Adrien, utilisateur aveugle d’un Iphone, ne parvient pas à naviguer entre les différentes rubriques ou à sélectionner des produits.

Matthieu, utilisateur malvoyant du site carrefour.fr dénonce le manque de contrastes qui empêche de lire certains prix.

Pour Auchan et Leclerc, les mêmes constats sont établis…

« Quand on est aveugle ou malvoyant, et qu’on ne peut pas faire ses courses seul dans un magasin, la seule façon d’être autonome, c’est de faire ses courses en ligne. L’inacessibilité des sites nous prive de la possibilité d’être autonome et nous rend dépendant d’un proche ou d’un vendeur. » – Pierre

Il est possible de faire mieux : prévoir des descriptions pour les images, inclure une alternative textuelle aux informations sous formes de couleurs ou encore structurer correctement les pages ou les formulaires.

4 grandes entreprises mises en demeure pour la première fois en France de se conformer à leur obligation d’accessibilité

Afin de témoigner des réelles difficultés et de justifier du choix des entreprises ciblées par la mise en demeure en juin 2025, un comité de test, composé de personnes en situation de handicap visuel compétentes en informatique, a été mis en place pour établir un constat clair et circonstancié sur l’accessibilité ou non des entreprises.

En parallèle, les associtions porteuses de l’action ont notamment reconnu :

·    Le caractère discriminatoire et handicapant de l’inaccessibilité numérique pour les personnes en situation de handicap visuel,

·      Le caractère injustifiable de l’inaccessibilité des services numériques, dès lors que le droit français a transposé la directive et que l’entrée en vigueur différée devait justement permettre aux acteurs de se mettre en conformité.

Aussi, au 1er septembre 2025, si la loi n’est pas respectée, les quatre entreprises seront assignées en justice.

L’objectif est clair : rendre accessibles les grands acteurs de la vie quotidienne, car chaque individu a droit au respect de sa vie privée et à sa propre autonomie.

Une précédente action en justice victorieuse contre l’inacessibilité des espaces numériques de travail

Le 21 mai 2024, le Tribunal administratif de Paris avait condamné l’État pour son refus d’agir pour rendre accessibles des logiciels utilisés par les enseignants et agents administratifs et sociaux de l’Éducation nationale, les élèves et leurs parents.

Cette décision constituait une première juridique et une victoire pour les personnes handicapées de la vue dont les intérêts étaient déjà défendus dans ce dossier par les associations apiDV et Intérêt à Agir.

Désormais, les établissements scolaires qui n’utiliseraient pas de logiciels accessibles pourraient être déclarés hors-la-loi.

À propos de l’association apiDV

apiDV – accompagner, promouvoir, intégrer les Déficients Visuels, créée en 1949, a pour vocation d’accompagner les personnes aveugles ou malvoyantes désireuses de conquérir leur autonomie sociale.  Reconnue d’utilité publique depuis 1959, l’association mène des actions et propose des services pour favoriser l’accès des personnes en situation de handicap visuel à la culture, aux études, à l’emploi, aux loisirs, à la technologie Pour ce faire, apiDV s’appuie sur 500 bénévoles, 21 salariés et 7 implantations. https://apidv.org/

A propos de l’association Droit pluriel

Fondée en 2009, Droit Pluriel est l’association nationale de référence pour la défense des droits des personnes en situation de handicap. Au quotidien, son équipe de juristes et d’avocats bénévoles informe gratuitement le public sur leurs droits, forment les professionnels de la justice à l’accessibilité et portent des actions de plaidoyer pour construire, ensemble une société plus juste et inclusive.  www.droitpluriel.fr 

À propos de l’association Intérêt à agir

Intérêt à Agir est une association réunissant des juristes et chercheurs pour faire évoluer le droit en faveur de l’intérêt général. Le collectif fournit son expertise juridique aux associations afin qu’elles utilisent le droit comme levier pour accélérer la construction d’un monde juste, solidaire et respectueux du vivant. http://interetaagir.org

Pour en savoir davantage :

Fanny Knipper – Agence de presse IDYIE : 06.19.73.14.19  – fanny@idyiecommunication.com

Pierre Marragou – Président Association apiDV : 06.77.37.56.89 – pierre.marragou@apidv.org

Clémence Malmejean – Chargée de communication Intérêt à Agir – clemence.malmejean@interetaagir.fr

Sébastien Courou – Chargé de communication Droit Pluriel :  07.43.15.64.20 – sebastien@droitpluriel.fr